Ouverture, normalisation et gratuité ne sont pas des synonymes !
Dans un monde où Libre/Open Source (qui pour rappel sont deux choses fondamentalement différente) est souvent synonymes de gratuité, à tord au regard des offres professionnelles dans le domaine des logiciels Libre (Novell, Mandriva, Red Hat, etc) et à raison pour beaucoup d'autres (Debian, Ubuntu, OpenBSD, etc), il devient quelquefois difficile de faire la part des choses. Pour la majorité - et cela n'est pas un reproche soyons précis et bien au contraire - les entreprises vivent avec leur business model basé autour de la vente (grande révélation !) de leur distribution et surtout du support (Ubuntu en propose aussi par exemple).
Néanmoins, ce n'est pas parce qu'un produit à une connotation Libre ou est Libre que celui-ci est forcément gratuit comme le dit si bien la définition de RMS (Stallman)/FSF : "Free software is a matter of liberty, not price. To understand the concept, you should think of free as in free speech, not as in free beer.".
A entendre certains débats lors des réunions à l'AFNOR pour la normalisation Open XML - ou sur bon nombre de forums sur le Libre - les concepts de norme, de standard, de format ouvert, de gratuité (réelle en terme d'utilisation, modification, redistribution ou pécuniaire/juridique), de son affiliation à la philosophie Libre/Open Source , à des produits Libre, etc ... se côtoient régulièrement dans une sorte de confusion assez singulière. Bien souvent toutes ces notions tendent à se retrouver autour d'une même notion, celle du Libre, alors qu'il s'agit pourtant de concepts divergents.
Par exemple, beaucoup de communautés du Libre peignent ODF comme étant plus ouvert que Open XML principalement parce que Microsoft est à l'origine du passage à l'ECMA pour standardisation de Open XML ou que ODF est déjà une norme. ODF est certes déjà une norme - ce qui est tout aussi respectable qu'elle est incomplète et fonctionnellement pauvre à bien des égards - mais sachant que les mêmes conditions juridiques sont appliqués aux deux formats dans le cadre de la normalisation ISO, j'avoue avoir toujours du mal à comprendre cet argument. C'est vrai, il est toujours facile de qualifier Microsoft de filou, et de douter de tout ce qu'il raconte (sûrement parce que les autres grandes entreprises du marché sont exemplaires, mais pas le diable de Redmond).
Les questions du juridique ont fait l'objet d'un groupe de travail et particulièrement sur l'aspect de la liberté d'implémenter les spécifications. C'est le groupe 2 de l'AFNOR, présidé par une active entreprise du Libre (corrigez moi si cette affirmation est fausse, mais c'est tout à votre honneur), qui à travaillé et qui a validé par un consensus le fait qu'il n'y avait pas de problème particulier sur cet aspect et que Open XML apportait les garanties suffisantes dans ce domaine (si si je vous assure c'est pas une blague, même si cela a pris son temps).
Si on associe 'ouverture' à 'norme ISO', ce qui je crois est assez courant comme l'on montré les débats, qu'entendons-nous par 'ouverture' dans ce cas ? la gratuité de l'accès aux spécifications ? La capacité d'implémentation de la norme par des particuliers ? L'exploitation des spécifications par les entreprises ? L'exploitation gratuite et sans contraintes juridiques de la norme (rien de plus normal pour une norme non ?) ?
Si vous répondez OUI à TOUTES ces questions en pensant fort à ODF et en dédaignant Open XML, alors il y a quelque chose que j'ai dû rater dans le raisonnement, ou alors la réflexion n'est pas tout à fait rationnelle.
Concernant la gratuité d'une norme ISO, je veux bien la considérer si quelqu'un me fourni les 342 Francs Suisse (208€) pour commander la spécification 1.0 d'ODF estampillée ISO (attention ceci n'est qu'un exemple 'au hasard') :
Même si nous n'avons pas gratuitement accès à la version normalisée de l'ISO (ce qui pour certain semble être un critère important pour développer 'librement'), et pour les personnes qui souhaitent travailler avec le format sans avoir à acheter demander à l'ISO de nous fournir le fichier PDF ou un magnifique CD (bonus disponible ?), il vous suffit de vous rendre sur le site de l'OASIS pour accéder aux spécifications standardisées OASIS (mais fondamentalement non normalisée ISO) : http://www.oasis-open.org/committees/tc_home.php?wg_abbrev=office ou si vous voulez être 'dans le move' avec les dernières versions de draft : http://www.oasis-open.org/committees/documents.php?wg_abbrev=office. Attention également, seul ODF 1.0 est normalisée ISO, la version 1.1 et 1.2 (et oui y a déjà eu pas mal de révision en 1 an et demi !) sont seulement standardisées OASIS.
Evidemment à l'instar de l'OASIS, l'ECMA met également à disposition gratuitement le standard ECMA-376 Open XML à cette adresse : http://www.ecma-international.org/publications/standards/Ecma-376.htm
De même, l'argument qui consiste à dire qu'il est difficile d'implémenter le projet de norme Open XML (attention je parle bien du format et non d'un convertisseur, par exemple binaire Office -> Open XML ou d'une suite bureautique) commence à me sembler de plus en plus idéologique et de moins en moins convaincant surtout au vu de mon expérience dans le domaine.
Certes Open XML est à l'instar de ODF, une norme perfectible mais au moins sur ces notions elles me semblent bien à égalité ... si l'on écarte sa connotation avec le Libre qui semble aujourd'hui l'argument de choc pour comparer les technologies.
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